L'HYper PRésent Appliqué à la Musique (et autres trucs...)

2.11.10

[Série] - Rubicon




Voilà bien une série dont le nom et la période de diffusion ne laissait pas espérer chez moi un enthousiasme délirant. Impossible avec ce sobriquet, Rubicon, de savoir de quoi ça allait parler. C'est con, mais pour moi, ça compte. Walking Dead, on imagine bien une horde de décérébrés avançant avec un œil pendant, un demi pied et 3 doigts ; The Event, on sait qu'il y a un EVENT qui se prépare, un truc énorme, un truc qui nous tiendra en haleine pendant au moins 6 mois/saisons/ans ; No Ordinary Family, on se doute bien qu'il y a un truc qui cloche chez les voisins là, un gros chauve évadé de The Shield qui fait la cuisine avec un tablier, non mais oh !?... Bref, dans la famille des nouvelles séries de 2010, on annonce le bousin à venir, on envoie le steak d'emblée sans la salade de tomates en entrée.
Rubicon lui, c'est le vilain petit canard. Non seulement avant de bouffer le plat principal, et mieux encore de savourer le délicieux dessert final, il prend la peine de proposer belle et douce entrée (en matière)... mais en plus elle est elle même précédée d'un subtil apéritif dont on ignore la provenance. Le tout, avec un sérieux goût de "reviens-y". Miam.
Je traduis : en gros, en lisant le nom, on ne sait absolument pas dans quoi on va tomber, le début est lent, posé, pas évident. Mais une fois plongé dedans, on savoure, on kiffe, on vibre, avant de se régaler sur la fin... et d'en demander encore ! Ça résume assez bien la manière avec laquelle j'ai "vécu" cette série.



Le pitch brièvement : un gusse au gros nez - déjà vu dans 24 - taffe pour une obscure institution gouvernementale indépendante chargée de lutter contre le terrorisme **tiiing tiiing déjà entendu tiiing tiiing**. A travers une suite de coïncidences tarabiscotées, une puce vient lui chuchoter à l'oreille que quelque chose de louche se cache derrière la mort de son mentor. Parallèlement, une femme tente de comprendre le geste de son mari qui vient de se faire sauter le caisson dans son beau manoir. Ceci est un spoiler de la première minute du pilote de la série, désolé.
Tout ça, plus le générique, honnêtement, on prend peur. Peur de se retrouver dans un mic-mac sans queue ni tête (mais avec un gros nez), d'élucubrations numéraires, de conclusions incompréhensiblement évidentes pour notre héros,...Hé bien, de tout cela, il y aura en partie. Et pourtant, on aimera. Enfin, en tout cas moi, j'ai aimé.

Et ce pour plein de raisons :
- le casting est excellent. Entre Will le solitaire dépressif qui devra rapidement s'improviser chef de bande, le gros Grant avec sa tronche de fonctionnaire anglais, le stressé Miles qui ne dort jamais, la droguée Tanya et ses yeux de chouettes, le vieux Ingram et sa voix de Père Fouras,...tous les rôles sont campés par d'excellents acteurs sachant - bien aidés par un script aux petits oignons - rendre crédible au possible leur personnage.
- le scénario / script : l'histoire globale ne recèle pas de trésors d'ingéniosité, de trouvailles jamais vues, ni de cliffhangers à couper le souffle. Non. Mais chaque épisode est une pièce importante du puzzle final. Rien n'est à jeter, chaque détail compte, pas de remplissage. Tout ne sert pas l'histoire elle même, non, mais le temps est simplement pris, autour d'une scène qui d'un œil extérieur peut paraître anodine voire ennuyeuse, pour creuser un personnage, une relation.  
Miles passe ses nuits au travail... 
Will reluque sa voisine,...
...
What The Fuck??
...
Ouais. Mais What The Fuck bien!
- esthétiquement réussi : je ne sais pas si AMC a fait signer une charte à ses séries, obligeant les réalisateurs à se casser le cul pour que visuellement ça marque, mais entre Mad Men, Breaking Bad, Walking Dead (bon, pas encore vu énormément, mais rien que le trailer déjà, brr...), et désormais Rubicon, ... comment dire..sé bo kikoo lol. Pas de split screens ou de trouvailles innovantes, pas d'effets spéciaux, juste de la réalisation de talent. Des plans bien choisis, de belles couleurs... On en vient presque à poser un œil "nouveau" sur un New-York pourtant tellement présent dans le paysage des séries/films.
Le parallèle avec la série 24 - aussi chère à mon cœur - me vient très souvent en tête en écrivant ces lignes. Tout oppose ces deux séries qui pourtant se retrouvent autour de thèmes similaires : menace terroriste, théories du complot, héros solitaire,...
Mais là ou Jack Bauer investigue aidé par des PDA, des satellites, des centaines de serveurs, des drones...Will travaille encore avec un stylo et du papier. Il griffonne, il gomme, il rature. Il réfléchit, Jack agit.
La CTU est abritée dans des locaux ultra sécurisés, avec des portes transparentes qui font "tchhh" quand tu les ouvres, des bilip bilip dans tous les coins...L'institut pour lequel travaille Will, l'API (American Policy Institute) travaille dans des locaux dignes de l'armée du salut. Des murs ternes et verts, des portes en bois (mais avec une vitre quand même), des salles de réunion avec un TABLEAU, et même... une cantine ! Will mange, Jack non. 
Dans 24, les bad guys sont ultra équipés et jamais là où on le pense. Dans Rubicon, quand ils vous prennent en filature, ils se planquent dans l'ombre d'une porte lorsque vous vous retournez.
Etc.
Je grossis volontairement le trait, car Rubicon n'est pas non plus le Derrick d'AMC (il y a aussi un service informatique avec des serveurs à l'API, Will utilise aussi un portable et possède une adresse mail), mais pour deux institutions travaillant au final dans un même but, je trouvai cette comparaison inévitablement intéressante.

Le traitement du "héros" peut aussi être source de comparaisons. Les créateurs de 24 essaient tant bien que mal de donner un aspect humain à Jack Bauer. Mais hé, on n'est pas dupe! Jack est un surhomme, un robot, un insubmersible, un indestructible! Il ont beau le faire rigoler en début de saison lorsque sa petite-fille lui fait un gouzi, ou bien en fin de saison lorsque l'on tue sa femme/fiancée/meuf, ça sonne - presque - faux. Et ça n'est pas ce qu'on attend chez lui, donc on s'en fout. 
Will est assurément plus humain. Plus proche de nous. Au contraire de Jack, on ne sait quasiment rien de sa famille. Mais par de subtiles petites touches, on arrive à nous faire comprendre à quel point il souffre d'une absence, d'une perte, dont il ne parle jamais. Le mec, quand il rentre chez lui, t'as l'impression qu'il peut se foutre en l'air à tout moment. Bon, après vu la gueule de son appart,...
C'est ici l'une des grandes réussites de la série : parvenir à marier le côté investigation avec le côté psychologique crédible de personnages attachants. Au pluriel oui, car même si moins mis en avant, le reste de son "crew" est aussi passé à la moulinette de l'intime.

 
Dernière, et non des moindres, différences entre ces deux séries : Will n'est pas seul à faire avancer le Schmilblick. Je ne dis pas que Jack la joue solo à 100%, au contraire d'ailleurs, mais le fil de Rubicon est mené par deux récits distincts (du moins au début). En effet, même si j'en parle moins - car moins passionné par ce côté - la quête de Katherine Rhumor visant à comprendre le suicide de son mari est tout aussi importante dans la compréhension globale. Aidée par des indices clairsemés par son mari avant sa mort, elle remonte petit à petit le fil de sa double existence, avant d'en saisir la pleine portée... Si je devais apporter un bémol à la série, ça serait sur le traitement de cette face là de l'histoire où j'avoue m'être parfois ennuyé, surtout dans sa partie inaugurale.

Gros coup de cœur pour cette série dont j'attendais initialement peu, mais qui me donna entière satisfaction. La fin de la saison est en plus suffisamment intelligente pour à la fois permettre une suite (saison 2 toujours pas confirmée...) ou nous laisser y réfléchir par nous même sans que l'on reste sur sa faim.



3 commentaires:

-Twist- a dit…

Fook. :(

Fa_sol a dit…

ouais...
"this is the end" comme disait l'autre... :/

Anonyme a dit…

Je valide totalement cet article ! La série est vraiment excellente : envoutante, passionnante, originale et très bien jouée !

Roger Felbow / Jack Balance