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25.4.08

dEUS - Vantage Point + Live @ Trabendo

Absents en France depuis les Solidays 2006, le quintet belge de dEUS était de retour au Trabendo pour un concert "promotion" de leur dernier disque fraîchement pondu : "Vantage Point".
Toujours appréciés, et donc attendus, par bon nombre de fans de tous âges, il fallait être assez réactif pour y décrocher des billets ; d'autant plus que l'opportunité de les voir dans une salle de taille modeste est assez désormais rare.



Un engouement multiplié par la sortie de ce tant attendu nouvel opus. Un album record pour nos belges avec seulement 3 mois de production. En prélude à son écoute, Tom Barman, charismatique leader, nous prévenait de l'orientation plus immédiate voire dansante de leur œuvre. Connaissant le professionnalisme du bonhomme, impossible de voir cela comme du bâclage, comme on aurait pu le supputer chez d'autres.

Ce virage avait été de toute manière amorcé avec leur précédent "Pocket Revolution" plus ouvert, moins rude que les anciens "Ideal Crash", ou "In a Bar Under the Sea". Mais du coup également moins bien accueilli par les fans hardcore du groupe.
Le cabrélisations du genre "c'était mieux avant" se faisaient déjà entendre à l'époque : nul doute qu'elles allaient être de nouveau à la mode avec ce "Vantage Point".


Assurancetourix n'est pas un personnage de fiction

La paire de premiers singles sortis pour l'occasion (Slow pour la France, The Architect pour la Belgique, puis la France) donnent dans le contradictoire. Le premier, assez noir, mené par une bonne ligne de basse doublé d'une guitare qui, sur deux notes répétées inlassablement, donne dans l'inquiétant. Jusqu'à un refrain, tout aussi sombre, chanté par un trio de voix graves. Morceau complexe, torturé et inspiré, mais pas très "lol". Avec en guest la chanteuse de The Knife, Karin Dreijer Anderson.

The Architect, après sa mini-intro rappelant Fell of the Floor Man, fait penser à ce que nous ont balancé les Kills dans leur récent (et excellent) "Midnight Boom". Du pêchu et dansant, du riff efficace mais un mélange final toujours habité de cet esprit rock, qui nous glisse à l'oreille "hé mec, nous aussi on préfère le rock à la musique classique". Un morceau fait pour suer donc.


Nous saffons les moyens de fous faire parler !

Deux titres qui en se suivant au cœur de l'album, en constituent avec Is a Robot le moment fort dans une trilogie quasi parfaite. Cette dernière à elle seule démontre que dEUS n'a rien perdu de ses facultés. Tant en mélodie qu'en puissance, on est servis comme des papes. Les guitares se croisent, la basse chapeaute, les voix s'entrechoquent, le refrain vient cisailler le tout avec un air simple. Des breaks, des duos de voix, une montée abrupte mais régulière, une fin en apothéose. Tout est là.

Afin de nous éviter la mort par tachycardie, Tom Barman et ses potes nous font atterrir en douceur, avec les plus calmes Smockers Reflect et The Vanishing of Maria Schneider aux refrains posés et mélodieux.
L'album se clôt ensuite avec un popissime Popular Culture, en guise d'aurevoir. Xylophone, cordes et piano au rendez-vous. Une fin qui me reste sur l'estomac.



Du coup, en guise de Digédryl, je me repasse le début de l'album, où When She Comes Down me redonne des sensations agréables dans le bas-ventre, la musclée Oh Your God vient rajouter un peu de piment entre deux refrains doucement "pop", puis Eternal Woman avec la voix de Lies Lorquet (du groupe Mintzkov) vient me remémorer la superbe Nothing Really Ends de leur précédent album.

Dans le rôle de l'album immédiat, que nous promettait Tom Barman, je ne pense pas que "Vantage Point" décroche un Oscar. A l'échelle dEUStique cependant, des titres comme The Architect, Slow, Eternal Woman ou Favourite Game sont des Obla-di Obla-da comparés à Instant Street pour ne citer qu'elle. Qui s'en plaindra ? Le clan cabrelistique des "c'était mieux avant", sûrement. Moi, non.



Mes précédentes expériences scéniques avec dEUS (Toulouse, Cabaret Sauvage et Solidays) s'étaient soldées par un "ohla, j'ai vu le concert l'année BORDEL". J'arrivai donc aussi confiant qu'un joueur de Ligue 1 venant jouer à Metz, tout en ne portant pas de maillot grenat, dans le Trabendo.

En première partie, le duo de The Black Box Revelations commence son set devant une fosse attentive à défaut d'être remplie. On pense aux Black Keys pour le coté bluesy-rock cradingue joué à deux et très fort, mais aussi un peu aux White Stripes pour les refrains plus pop-rock-garage. Techniquement très bon, sonorement excellent, et scéniquement maitrisé : le duo d'espoirs flamand assure le boulot avec brio.


S'il vous plait, adoptez nous...

Le public se presse alors dans la fosse du Trabendo pendant que le matos de dEUS est installé. Cependant, on n’en sent pas de véritable montée de température, les gens semblant attendre le concert comme l'on attend le bus. Soit. Après tout, le spectacle est censé être sur scène et non ailleurs.


"Putain, je kiffe."

Arrivent alors Tom Barman et sa troupe, très décontractés, qui débutent leur set de la même manière que commence "Vantage Point". L'intro de When she comes down est assurée à la basse, la voix de Barman se pose dessus, et est rejointe par la gratte du ténébreux Mauro. Entrée en douceur sur un titre qui ne décolle jamais réellement, mais pose les jalons de la soirée "hey les frenchies, voilà notre nouveau bébé, vous allez aimer".

Vu le peu d'entrain manifesté, nul doute alors que la majorité semble plutôt venue (re)voir Instant Street ou Fell of the Floor Man. Ca se comprend.

Attente de courte durée, car après avoir enchainé Sun-Ra (et ses montagnes russes) et Favourite Game (et ses "ahh ahh ahh" pas contents du tout), l'intro de Fell of the Floor Man, est balancée, et provoque - enfin - les premiers frissons. La fosse clapote, les sourire fleurissent : putain, enfin le printemps. Moment alors choisi enchainer les inséparables nouveaux singles, The Architect et Slow, aussi sensuels qu'efficaces, qui font alors monter la pression jusqu'à ... Eternal Woman, toute en douceur et légèreté.
Pas surprenant quand on connait le plaisir qu'éprouve dEUS à varier brutalement les tempos. Pas surprenant non plus donc de voir Tom Barman garder sa guitare électro acoustique, et démarrer ensuite l'intro d'Instant Street sous les clameurs d'un public qui attendait cette étincelle pour enfin prendre feu.



Avec ce titre, dEUS change de planète, prend une dimension énorme, peut résoudre les maux de toutes les sociétés réunies, stopper les guerres, faire tourner la Terre autour de la Lune, faire pousser les patates sur des arbres à frites, faire chanter les poules en si bémol, ouvrir un océan comme Moïse, mais en plus y construire un tapis roulant allant à 12km/h et qui fonctionne, bref, on touche au grandiose.

Sans aucune gène, je la range aux cotés de Paranoid Android de Radiohead, ou encore Smells Like Teen Spirit de Nirvana, dans le panthéon des chansons du genre "que j'amènerai sur une ile déserte". Avec ça, je survis à poil dans la jungle sans souci.



La chanson prend en plus une dimension gargantuesque en live, avec ce riff inoubliable, tordu et perdu dans les montées progressives de la guitare rythmique, le tout accompagné par des hurlements du public totalement transporté de joie. dEUS nous tient alors par les burnes, et pour de bon. La dernière note laisse place à une salve Ô combien méritée d'applaudissements et clameurs d'une foule enfin libérée. Le groupe enfonce alors le clou avec le meilleur titre de "Vantage Point", Is A Robot, et un final aussi tout en tension.

Enchainement fatal. Joie intense. Des larmes sur mes joues.
- "C'est pas moi qui pleure, c'est mes yeux", comme dirait l'autre.
Ok, j'ai une légère conjonctivite, mais quand même. Je suis totalement emballé, et ça n'est certainement pas le génial Bad Timing, à la guitare lancinante du début à la fin, accompagnée d'une progression dont ils ont le secret, qui me fera changer d'avis. Morceau d'une précision diabolique au refrain tant hurlé que chanté, et à la fin explosive.
- "dEUS m'a tuer", comme dirait l'autre (pas le même autre mais un autre).



Besoin de souffler pour tout le monde après une telle débauche d'énergie. L'euphorie est cependant un peu retombé dans la fosse après Is A Robot. Tom Barman nous répète donc à l'envie "you should be doing it" (Smockers Reflect), avant de conclure sur l'ancien et excellent Roses. Mes pieds ne touchant plus terre depuis 45 bonnes minutes, j’aperçois alors la set list, qui m'indique que le groupe a prévu de revenir encore jouer 3-4 titres.

Le temps de quelques applaudissements bien fournis, de "ooohoohoohoohoooh" made in France, et revoilà nos belges sur scène. Parfois torché à la va-vite par des artistes pressés de rejoindre leur loge, leurs putes et leur coke (rock'n roll), le rappel qui suivra sera tout simplement dantesque. Un Theme For Turnpike toujours aussi tordu et superbement conclu par les hurlements de Mauro, un très efficace Oh Your God, puis un classique tant attendu (Suds and Soda) : nouvelle ovation pour dEUS qui ne nous quittera définitivement qu'après un Popular Culture assez mièvre.



Ils auraient tout aussi pu terminer avec la Danse des Canards version Samba, l'impression globale de la soirée n'aurait pas été différente : superbe prestation une fois de plus pour nos 5 belges, même si beaucoup regretteront le manque d'enthousiasme de la foule présente. Qu'importe, le groupe fut bon, les anciennes chansons toujours aussi excellentes, et les nouvelles très prometteuses.

Résumons : Groupe Bon x (anciennes chansons excellentes + nouvelles chansons prometteuses) - public un peu mollasson = excellent moment.
Au fil du temps le groupe gagnera de l'assurance et des automatismes sur des nouveaux titres parfois hésitants.
Un groupe à ne surtout pas louper donc pour leurs prochaines venues françaises.

On me murmure à l'oreillette qu'un festival d'été dans l'ouest du pays serait sur les rangs ?



dEUS par un nouvel album d'une grande qualité, et une prestation live pleine de promesses, se classe en première position des groupes Belges et se qualifie une nouvelle fois pour la Ligue des Champions des groupes européens. Encore assez loin devant les méritants Girls in Hawaii, Soulwax et Ghinzu promis à la coupe UEFA, ou bien les Hollywood Pornstars, Tellers et Flexa Lyndo, outsiders de qualité.
Le championnat belge promet donc de belles affiches pour pas mal de temps encore.

Un vainqueur certain : le spectateur.

Pendant ce temps là, en France, Cali et Calo(gero) sont sur un bateau. Quelqu'un pour les pousser les deux à l'eau ?




dEUS - "Vantage Point"(2008)


1. when she comes down
2. oh your god
3. eternal woman
4. favourite game
5. slow
6. the architect
7. is a robot
8. smokers reflect
9. the vanishing of Marta Schneider
10. popular culture


dEUS @ Trabendo (set list)

1. When she comes down
2. Sun Ra
3. Favourite Game
4. Fell of the floor, man
5. The Architect
6. Slow
7. Eternal woman
8. Instant street
9. Is a robot
10. Bad Timing
11. Smokers reflect
12. Roses
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13. Turnpike
14. Oh Your God
15. Suds and soda
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16. Popular Culture

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